mardi 1 juin 2010

La porcelaine de Giey sur Aujon

Une concurrente potentielle à la porcelaine de Sèvres

Vers 1808 , une nouvelle industrie s'implante à l'emplacement de l'ancienne filature de Giey sur Aujon: Une fabrique de porcelaine . La date de création de l'entreprise varie entre 1806 et 1809 selon les auteurs. On la doit à François Guignet , né le 4 octobre 1771 à Flagey entre Vaux sous Aubigny et Dijon. François Guignet aura été maire de Bugnières de 1815 à 1823, année durant laquelle il quitte ce village pour venir se marier à Giey-sur-Aujon. Le marié a 51 ans. Sa femme, Charlotte Faipoux 29 ans, née à Philadelphie, est la fille du premier régisseur de la fabrique de porcelaine. La famille Guignet a trois enfants après ce mariage. L'un d'eux, Ernest, né en 1829 atteindra la célébrité en tant que chimiste français le plus réputé du XIX ème siècle, puisque c'est lui qui inventera le célèbre vert-guignet qui porte son nom. Il deviendra aussi sous-préfet de Langres au début de la 3e République.
François Guignet, le père, est le condisciple de Napoléon Bonaparte à l'école de Brienne. Fournisseur en bois de la marine impériale, il achète des forêts dans la région et habite le château de Beauvoisin. C'est un entrepreneur important toujours à l'affût de capitaux et créateur, à l'aide d'associés, de plusieurs sociétés. C'est d'abord depuis Bugnières qu'il dirige la fabrique de porcelaine créée à Giey-sur-Aujon. Il s'agit de porcelaine dure dont la fabrication est simplifiée par rapport à la porcelaine tendre, mais qui permet de laisser libre court à l'inspiration des artistes. Les produits de luxe tournés et cuits à cet endroit rivaliseront pendant un certain temps, de 1820 à 1830 avec ceux de la manufacture royale de Sèvres. Les fours et les ateliers sont construits à Giey entre l'église, la poste et l'Aujon. Des spécialistes étrangers (peintres italiens) sont embauchés . Les peintures et les dorures, si célèbres, sèchent dans les hautes maisons du village offrant de vastes greniers. Une production variée aux formes antiques et élégantes avec des dorures qui passent pour être supérieures à celles de la porcelaine de Paris. Les décors des services sont extrêmement fouillés avec des compositions florales minutieuses exécutées dans de délicates harmonies de vert, de mauve et de roses parfois agrémentées de rubans, ou plus rarement de petits oiseaux.
Dans un premier temps, l'usine fonctionne bien. Son dépôt parisien se trouve chez les sœurs Faipoux et en 1827, la manufacture est récompensée. Mais les Bourbons n'aident pas autant qu'il le faudrait cet ami de Napoléon et lui créent parfois des ennuis. Le combustible des fours est très bon marché, mais il faut s'approvisionner en kaolin à Limoges. Les rouliers partent pour deux mois avec tombereaux et chevaux afin de ramener cette matière première introuvable dans la région. Guignet use sa fortune et celle de ses amis à maintenir son entreprise en vie ; aussi en 1837, se contente-t-on de faire venir de Paris de la porcelaine blanche que l'on décore. C'est pour cette raison que l'on trouve fréquemment deux assiettes au décor strictement identique mais avec un poids différent. En 1844, l'établissement qui aurait pu rivaliser avec la manufacture de Sèvres est en faillite et les bâtiments sont vendus.
Aujourd'hui, de cette industrie, subsistent de belles cafetières, des tasses, de magnifiques vases et des assiettes. Ces créations témoignent du savoir faire et de l'inspiration qui fit la renommée de cette fabrique et sont autant de pièces recherchées par les collectionneurs avertis dont on peut seulement admirer quelques exemplaires aux musées de Sèvres (vases précieux) et de Langres (service à café).